Une douleur peut en cacher une autre​

Spondyloarthrite axiale radiographique et non radiographique : impact de la douleur sur la qualité de vie du patient, divergences selon les sexes et prise en compte par le rhumatologue

​Douleurs articulaires inflammatoires chroniques et qualité de vie sont difficilement compatibles. Raison pour laquelle les douleurs liées aux spondyloarthrites axiales radiographiques et non radiographiques doivent être considérées avec soin, en vue d’améliorer le quotidien des patients.
Dans cette démarche, il est impératif de : 


Mesurer les différents impacts de la douleur sur la vie du patient,

Améliorer les besoins non couverts en termes de gestion de la douleur dans l’axSpA-nr,​

Prendre en compte les divergences existantes entre les hommes et les femmes,

Proposer diverses mesures thérapeutiques (médicamenteuses ou non). ​


Impacts multiples de la douleur sur la vie quotidienne du patient

Dans une enquête, évaluant l’impact de la douleur sur le quotidien des patients atteints de spondylarthrite ankylosante, on constate que 83% des 175 patients rapportent des douleurs ainsi que des difficultés associées et pour un tiers d’entre eux, cette douleur serait un symptôme très important (1).

Concernant le caractère chronique et généralisé de la douleur, il est avéré pour 43% des patients souffrant de spondyloarthrite axiale (2). Ces données démontrent l’omniprésence du symptôme douleur chez ces patients, dont les répercussions seraient nombreuses et toucheraient tous les domaines de leur vie.

Lorsque l’on s’attarde plus précisément sur les répercussions de la douleur chronique, elle se matérialise comme un véritable fardeau dans la vie des patients, impactant à la fois les activités fonctionnelles (troubles du sommeil, activités professionnelles, tâches ménagères, loisirs), mais aussi les relations sociales, familiales, intimes, et par conséquent ont des retentissements économiques (invalidité, diminution de la productivité au travail, absentéisme) et finalement impacte le bien-être émotionnel (irritabilité, énervement, anxiété, dépression) (3).

Dans une enquête mondiale en vie réelle (13 pays, 5 continents) menée auprès de 705 patients atteints de spondyloarthrite axiale radiographique, 

Il est démontré que les patients souffrant de douleurs intenses* ont un taux d’employabilité plus bas par rapport à ceux ayant une douleur moins importante** (71,6% vs 89,8%). 

De même, on constate un taux de chômage ou d’arrêt anticipé de l’activité professionnelle supérieur chez les patients ayant des douleurs intenses comparativement à ceux souffrant de douleurs moindres (10,9% vs 7,5%) (4).

Ces chiffres mettent en exergue l’impact des spondyloarthrites et les enjeux de prise en charge de la douleur par les praticiens. ​

*Patients ayant des scores de douleur à la question 2 du BASDAI compris entre 5 et 10
**Patients ayant des scores de douleur à la question 2 du BASDAI inférieur à 5 ​

Globalement, et pour toutes les raisons précédemment évoquées, l’impact physique et psychologique des douleurs articulaires inflammatoires est important. Pour un certain nombre de patients souffrant de spondyloarthrite axiale, la douleur et son impact sur leur vie quotidienne a contribué à leur dépression. En effet, être dans l’incapacité de participer à des activités avec leurs proches, être dans l’obligation de changer d’activité professionnelle afin de se préserver, ou encore le manque de compréhension des proches peuvent laisser chez eux un sentiment de frustration et d’isolement (5).


Hommes et femmes présentent des tableaux cliniques et des symptômes douloureux distincts dans les spondyloarthrites

Dans les spondyloarthrites, les rhumatologues s’accordent à dire qu’ils observent des tableaux cliniques différents chez l’homme et la femme. ​

Les études démontrent en effet que chez les patients atteints de spondyloarthrites, la sévérité de la douleur diffère selon le sexe, avec davantage de douleurs observées chez les femmes (2 à 3 fois plus de douleurs généralisées axiales et périphériques chez celles-ci) (6). ​

Les femmes ont davantage d’atteintes périphériques que d’atteintes axiales comparativement aux hommes (qui eux ont plus souvent une atteinte inflammatoire rachidienne) (7). Quant aux signes radiographiques, les études confirment qu’ils sont moins présents chez les femmes mais ces dernières présentent davantage de formes extra-articulaires (5).

En pratique clinique, chez les femmes, les rhumatologues rapporteraient une tendance à évoquer des douleurs plus intenses, moins de période de rémissions, un fardeau de la maladie et une dégradation de la qualité de vie plus important (8,9).


Dans les rhumatismes inflammatoires chroniques, on peut observer un déconditionnement musculaire concernant les femmes au même titre que les hommes. Ce déconditionnement se traduit par une perte de masse et des capacités musculaires et est causé par l’âge, l’alitement prolongé ou un mode de vie sédentaire. Ce déconditionnement est à l’origine d’une diminution progressive des capacités fonctionnelles de l’organisme et implique une augmentation de la sédentarité ainsi qu’une perte d’autonomie (10).


Tenir compte des PRO et limiter l’inertie thérapeutique dans la nr-axSpA

Quel que soit le tableau clinique identifié, prendre en considération la parole du patient et ainsi évoluer vers une décision médicale partagée est une clé de l’alliance thérapeutique et une recommandation pour la prise en charge des maladies chroniques (11). En effet, mesurer les PROs des patients est une priorité afin de prodiguer les soins les plus adaptés. La récupération de ces résultats, par le biais de questionnaires standardisés, serait associée à une meilleure gestion des symptômes ainsi qu’à une meilleure qualité de vie (12).

La prise en charge rapide et efficace de la douleur est aussi un véritable enjeu dans les spondyloarthrites axiales non radiographiques (nr-axSpA). En effet, bien que cette forme soit plus précoce et bégnine que la r-axSpA, le fardeau de la maladie reste le même et la qualité de vie est tout autant altérée (13).

Une enquête quantitative a été menée auprès de 100 rhumatologues, via des questionnaires sur internet, afin de déterminer la place de la douleur dans la prise en charge des SpA ainsi que les attitudes des rhumatologues dans la gestion de la douleur. Il a été mis en évidence que la douleur est le principal symptôme rapporté à la fois par les patients atteints de spondylarthrite ankylosante et ceux atteints de spondyloarthrite axiale non radiographique (76% et 81% respectivement) et que les niveaux et localisations des douleurs étaient relativement identiques dans les deux pathologies (14).

Seulement les thérapeutiques ont été sous étudiées dans la spondyloarthrite axiale non radiographique. Le temps de diagnostic est aussi très retardé : 6 à 8 ans, ce qui entraine une initiation tardive à d’autres traitements plus efficaces après une réponses inadéquate aux AINS (13). Ce temps de latence est risqué car il a été observé que si malheureusement le contrôle de la pathologie intervient trop tard ou incomplètement, des douleurs nociplastiques résiduelles peuvent persister.


Traiter rapidement et efficacement la douleur des patients atteints d’axSpA, que la forme soit radiographique ou non, est un véritable enjeu pour le rhumatologue car le poids et l’impact de la maladie sont équivalents ce qui justifient le même recours aux options thérapeutiques (biomédicaments) (15).